mercredi 7 avril 2010

L'EGLISE DE CHRIST FACE A LA MONDIALISATION


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ANALYSE CRITIQUE DU PHENOMENE DE
MONDIALISATION ET PROPOSITIONS
 PROSPECTIVES CHRETIENNES 



A/- INTENTION INITIALE, CONTRADICTIONS ET 
EFFETS PERVERS DU PROJET DE  MONDIALISATION

La mission originelle, déclarée, de la mondialisation, appellation officielle de l’occidentalisation du monde, était  l'affranchissement des hommes et des femmes de l’oppression, de l’obscurantisme et de la misère, la promotion de l’individu contre l’emprise des stéréotypes des sociétés anciennes, l’épanouissement de la personne, la constitution d’une société juste, pacifiée, fraternelle, la fondation d'une  république universelle - (mission n’étant, en fait, que la continuation du contre-projet de révolte contre Dieu, fomenté  par lucifer, en Eden, à l’instigation duquel les ascendants de l’humanité naissante, Adam et Eve, séduits par ses allégations mensongères létales, perpétrèrent la transgression  générique, qui devait constituer la cause matricielle d’une « crise systémique catastrophique » dont l’exacerbation et l’amplification exponentielles,  au long des siècles,  devaient aboutir à la « crise globale finale » que nous connaissons (GENESE 3:1-6; MATTHIEU 24; APOCALYPSE 18) 


Déjà, au simple plan historique, l’échec était inscrit d'avance au centre même de  « l'intention universaliste du dessein », en raison de la nature invalidante de l'homme. Cet échec devait se  révéler, par l'expression précocement constatée et ultérieurement aggravée, d’une criante contradiction entre l’enrichissement et le bien-être croissants d’une minorité de la population, face la spoliation, l’exclusion, la paupérisation plus croissantes encore, de l'immense majorité de cette même population, et ce, en contexte de pénurie de messianisme et d'utopie humanistes. 


Cet état de fait génère une société globale, massifiée, inégalitaire, dépourvue de toute alternative historique, marquée par une  crise de rupture, profonde, sans précédent, non simplement fonctionnelle, transitoire, comme déjà produit dans le passé, mais structurelle, permanente et systémique. 

L'impact dramatique, économique, culturel et social, du phénomène de  mondialisation est une conséquence directe de son expansion exponentielle. La mondialisation est, en réalité, un mouvement d’occidentalisation du monde, « d'universalisation du mode occidental de financement, production, consommation et institutionnalisation des rapports de force.

A ce titre, elle est une dialectique de l'exploitation rationalisée, maximale, des ressources terrestres, un « dépassement dynamique sophistiqué » de la phase de domination primaire coloniale, assignant aux pays  détenteurs de matières premières un rôle de simple réservoir. 


Dans cette nouvelle étape historique, l'institution du  libre-échange globalisé valorise et légitime une extraction et une transformation illimitées de ces matières premières par les puissances dominantes, seules à disposer des moyens techniques et financiers appropriés pour ce type d'économie (JACQUES 5:1-6)

Cette mondialisation, matrice de rapports marchands systématisés, s'accroît tendanciellement en  une « spirale inflationniste effrénée. » Il s’agit d’une « démesure »  de  l’activité commerciale et d’une dérive de la fonction finance qui, de simples moyens, se muent en finalité dommageable et préjudiciable pour l’ensemble de l’écosystème planétaire et de l'humanité.

Ce mouvement déréglé de flux financiers et de rapports marchands, mercantilise, indistinctement, toutes formes de valeurs et de vie, même celles déclarées, de tous  temps, comme « hors transaction, hors commerce ». 


Il inocule rivalité, opportunisme, compétition et violences égocentriques ou ethnocentriques, dans les relations sociales, constituant un vecteur de dissociation individuelle, de désintégration communautaire et de perte de perspectives spirituelles, libératrices des consciences (1 TIMOTHEE 6:6-12)

Ce processus d'hyper-rationalité, d'oblitération et de massification de l’imaginaire individuel et collectif », induit un effet pervers de déstabilisation de l’identité des communautés humaines, dans l’accomplissement de leur projet de construction d’un « sens » alternatif, qualitativement supérieur, de type  spirituel.

La "culture chrétienne", définie comme ensemble de symboles, représentations et d’expériences
hautement signifiants, facilitateurs, stimulateurs de croissance et de développement  de personnes et de projets, subit, dans le cadre la mondialisation, une pression de conformité telle, qu’il n’est plus d’autre choix que le seul format de réalité imposé - sauf décision de résistance spirituelle, cognitive, comportementale, pacifique, innovante, non conforme au modèle unique (ROMAINS 12:1-2)

L’occident, promoteur de techniques et d’idéologies, selon une mono-optique matérialiste, une recherche indéfinie de croissance et de progrès, dans le cadre d'une  « culture de l’homme érigé en finalité ultime », véhicule, dans le même temps, contradictoirement, une inexorable dynamique de dévalorisation et de déclin de la vie  (MARC 8:36-37)

Cette « volonté de puissance fantasmatique de maîtrise des forces de la nature, de rêve de conquête du monde, de réalisation de fraternité universelle, anthropocentrique », que les concepteurs ont cru devoir et pouvoir fièrement déployer, ne fait que parachever, en dernière analyse,  le « rêve babélien », caractéristique d'un déni complet de la crise de « transgression générique » perpétrée en Eden par l'humanité naissante, obsessionnellement focalisée, depuis lors, sur son projet d’auto-rédemption par les  sciences et les techniques, autrement dit, par  ses propres oeuvres (PROVERBES 28:13)

Ce projet de « tour de Babel mondiale », irréductiblement centré sur la réalisation de son « objectif de fraternité universelle, d'unicité de peuple et de langue », révèle, à l'analyse, un gigantesque mécanisme de  défense de « l’identité transgressive humaine», par le biais d’un puissant système de sublimation, surcompensation, amplification, légitimation, justification, institutionnalisation de la transgression matricielle, jusqu'à son accès au stade final de paradigme civilisationnel, seul admissible par la totalité des habitants de la terre (GENESE 11:1-9; APOCALYPSE 18:5)

Ce grave déni de réalité sur la nature même de l’homme fait de cette cité planétaire une réalité, jusque-là inédite dans l’histoire du monde, où s’enchevêtrent, confusément, convoitises,  enrichissements, paupérisation, injustices, souffrances, frustrations et violences. Les sciences et les techniques censées apporter, initialement, la prospérité et la paix universelles, engendrent, paradoxalement et dramatiquement, en fin de compte, des foyers de tensions et de conflits meurtriers chroniques (ROMAINS 3:10-20; JEREMIE 17.5)

Cette vision onirique d'universalité se transforme en un inéluctable cauchemar, de par son irréalisable «idéal de fraternité - sans Dieu ». C'est alors qu'interviennent les techniques de lissage des dysfonctionnements économiques et sociaux par pression croissante de conformité collective, le raffinement du contrôle social des « citoyens du monde » et la massification des comportements, pour tenter d'accoucher, au forceps, l’utopique intention des fondateurs (2 THESSALONICIENS 2:7-12)



B/- LES ORIENTATIONS STRATEGIQUES DE L’EGLISE DE CHRIST FACE A LA MONDIALISATION

L’occident surcompense sa faillite spirituelle par une élévation de la vie terrestre, une exaltation de ses réalisations et possessions, en valeur suprême, comme un  « substitut de vie éternelle » tragiquement inexistante dans son champ de conscience (COLOSSIENS 3:1-4)

Ceci le réduit à la merci d’une prégnante temporalité séculière, contre  laquelle il doit anxieusement lutter par une activité compulsive, incessante, répétitive, faite d'accomplissements d’œuvres et d'accumulations d’objets, autant de frustrants « substituts chimériques » d'une perspective  d’éternité oblitérée (JEAN 8:34)

Outre le matérialisme induit par ce système, l’individualisme constitue un agent de corruption du lien social et de décomposition des solidarités traditionnelles. Il apparaît, initialement, comme un moyen de libération de contraintes et d’ouverture de possibilités mais se révèle, cependant, à terme,  destructeur des solidarités qui sont les fibres et la trame des tissus communautaires, eux-mêmes toiles de fond d’accueil de vies et d'histoires individuelles (JACQUES 1:14-15)

Notre conviction est que les communautés, fondées sur l’évangile, ont toutes les compétences nécessaires pour faire face à cette crise néfaste, en offrant une alternative de  vie à un monde déstructuré, en pertes de repères et désarroi complet (LUC 5:13-16; PIERRE 2:9-12)

Loin de vouloir sauver le « système monde » dont le texte révélé décrit, en APOCALYPSE 18, l’incurabilité et l’effondrement final, ces communautés spirituelles, dépositaires d’un savoir de qualité supérieure, sont en capacité, par leur héritage spirituel – en activation et actualisation constante - de compenser significativement les effets dévastateurs  de cette crise systémique globale, par diffusion et partage de leurs valeurs emblématiques de respect, estime, considération et accueil inconditionnels du prochain – représentatives d’une culture  de la vie, en réponse aux archaïques programmations de la culture de mort (1 PIERRE 4:1-11)


Les chrétiens de cette génération, potentiellement celle du retour du Seigneur, sont conviés à une sérieuse prise de conscience de ce que signifient  leur référence et leur  appartenance au peuple et au royaume de Dieu, pour endosser et assumer pleinement  leurs responsabilités de disciples,  face à une humanité en souffrance, sous l’empire de la  pression de « modèles matérialistes fétichistes », fondés sur une recherche effrénée de satisfactions égocentriques, à base de rendement, productivité, profits et d’éviction du  prochain (2 CORINTHIENS 13.5; LUC 6:46-49; MATTHIEU 5:44-48; LUC 14:12-14)

Ces modèles, authentiques « idoles des temps modernes », de surcroît, puissants générateurs de discrimination, d’exclusion sociales et d’aliénation cultuelle et culturelle,  doivent être répertoriés, examinés, au regard de la pensée biblique et faire l’objet de propositions de contre-modèles (LUC 6:31-36)

Celles-ci pourraient consister en une exigence, pour chaque être humain, d’une garantie, au droit d’estime, de considération, d’accueil inconditionnel bienveillant dans la société  humaine, de par sa simple naissance; au droit de respect absolu de son intégrité spirituelle, physique, intellectuelle, morale, sans dérogation ni exception; au droit  incompressible au développement, dans les domaines respectifs, de la famille, de l’éducation, de l’économie, du social et de la culture (ROMAINS 15 :1-7; EPHESIENS 4:2,32; 5:21;  ROMAINS 12:10, JACQUES 5:16, ROMAINS 14-13; JACQUES 4:11, GALATES 5 :26; 1 THESSALONICIENS 5:11)

En considération des défis, risques et enjeux, posés par ce « système monde globalisé », l’impératif spirituel des communautés chrétiennes réside dans la préservation de la  spécificité de leurs valeurs identitaires, le maintien de leur potentiel de prospective prophétique catalyseur des réalités communautaires, la démonstration de la présence, en  leur sein, du Dieu Rédempteur porteur d’un message d’amour et d’une puissance de salut, à une humanité résignée face à une « machine monde » pesant sur elle, ressentie comme une fatalité (2 CORINTHIENS 3:16-18; MATTHIEU 5: 13-16; 1 JEAN 5:3-5; 1 PIERRE 4.10 ; GALATES 6:2,23)

Directement confrontée à cette crise systémique globale, aux conséquences encore mal évaluées, les communautés chrétiennes ont la responsabilité historique  de dépasser  leur conception de « la sphère du privé de la foi », pour faire entendre la Volonté de Dieu dans « la sphère du public », sans confusion des genres, avec distinction des identités  respectives du « corps social » et du « corps de Christ », ontologiquement irréductibles l’un à l’autre.

Ainsi sera éradiqué tout déni de réalité de la situation et exprimée la conscience de Christ, au travers de son corps, l’église, en prise directe, temps réel et relation de  proximité avec les gens et les groupes dans la souffrance (MATTHIEU 20:26-28)

Dans cette optique, seront formulés des modèles sociétaux alternatifs, intégrateurs, valorisant des attitudes de soutien, d’aide et assistance aux personnes en situation de  fragilité, de précarité et supportant des projets d’économie solidaire adaptés aux contextes locaux. 

Ces conseils et actions pédagogiques, créatifs, innovants, assimilables et praticables par une population non chrétienne, auront, par ailleurs, l’avantage de constituer une étape préparatoire à des conversions ultérieures, en  toute liberté,  conviction et conscience des intéressés, hors de toute instrumentalisation ou culpabilisation en raison du secours précédemment apporté (LUC 3:4-6; JACQUES 2:14-17)


Une telle conception communautaire, solidaire, permet, en plus du secours immédiat porté dans des situations de nécessité, de véhiculer un message évangélique holiste, de prise en considération de l’intégralité des besoins de l’être - esprit, corps, âme -  au cœur de la société humaine; « témoignage direct d’une vie nouvelle agissante » au sein d’un monde  disloqué, dissocié, mortifié, stigmatisé par une culture, individualiste, matérialiste, déshumanisée et déshumanisante (2 PIERRE 1.3-8)



C/ LE MAGISTERE ETHIQUE PUBLIC DE L’EGLISE 
EN DIRECTION DES DECIDEURS POLITIQUES

Les églises, traditionnellement neutralisées par leur conception erronée d’un « christianisme replié sur son privé », démissionnaires face à leur « magistère éthique » vis-à-vis d’un monde sans Dieu, manquent à leur responsabilité de « leadership d’opinion », d’aiguillage et d’orientation du monde vers des critères de justice sociale, conformes à la logique  créationnelle et au principe de providence de Dieu sur le monde, dans l’attente de la conversion des pécheurs et de l'avènement du Règne Divin  (LUC 10:30-37; MATTHIEU 28:18-20)

Le leadership d’opinion des chrétiens sur le monde, doit consister en une démonstration magistrale de la supériorité absolue de leurs valeurs révélées, en matière de structuration de  vies individuelles et collectives, par leurs pertinentes, cohérentes, convergentes et performantes attitudes en interaction, de compassion, coopération, interdépendance, interconnaissance, intersoumission et coresponsabilité (LUC 4 :16-19; ROMAINS 15:8-13)
 
La mise en pratique, dynamique de ces qualités interactionnelles, par les diverses communautés, indissolublement unies, articulées en réseaux de solidarité, sur la base de  principes doctrinaux clairs, irréfutables, hors ferments de traditions humaines annihilateurs du commandement de Dieu, constitue une condition indispensable pour atteindre le seuil de « masse critique », déclencheur d’un impact maximal sur l’environnement humain (JEAN 17:17-23; EPHESIENS 2:10)

Les disciples de cette génération sont, plus que jamais, appelés à opérer l’administration de la preuve de leur appartenance au Royaume de Dieu, en combattant, par  le moyen de l'Evangile, puissance intrinsèque de Dieu, les dominations occultes, aliénatrices de ce monde - servant ainsi leur Dieu, seul dispensateur de vie, en Jésus-Christ, de tout leur cœur, de toute leur âme, de toute leur pensée. (ROMAINS 1:16-17; EPHESIENS 6:10-12; MATTHIEU 22:37-40). En effet, le royaume de Dieu ne consiste pas en parole mais en démonstration d’esprit et de puissance (LUC 9:11-17; MATTHIEU 6:9-13)

Ils doivent, dans cette intention, élever une voix prophétique collective, puissante, capable d’influencer le cours des évènements régionaux, nationaux, mondiaux, pour que  soient traités en « priorité et urgence absolue », les besoins, attentes, aspirations des êtres humains les plus souffrants, démunis, opprimés, laissés-pour-compte - créatures de  Dieu appelées au salut.

En vue d’une progression vers ces objectifs vitaux de justice, un plan de vigilance devrait être établi pour faire connaître, de manière pacifique, constructive mais déterminée, aux responsables politiques des divers niveaux d’organisation nationaux et internationaux, les valeurs éthiques des communautés évangéliques concernant le service à apporter aux populations ainsi que les attentes en matière de décisions et de reddition de compte, de la part des décideurs, par:

                    (AMOS 5:14-15; AMOS 8:4-7; ZACHARIE 7:9-10)
  • l’application généralisée des critères internationaux relatifs au respect de l’intégrité des droits de la personne (droits fondamentaux de la personne, non marchandisation de la  vie, préservation de l’environnement …) moyens importants de transition, de l’immunité et de l’impunité vers la responsabilité, chez les programmeurs et promoteurs de la « mécanique monde déréglée »
  • une participation et un pouvoir de décision, accrus et significatifs, des pays en voie de développement, au fonctionnement des institutions multilatérales qui s’engageraient alors à une pratique de  transparence de l’information, du suivi effectif et de l’exécution réels des résolutions votées par toutes les parties concernées, sans exception
  • le développement et la mise en œuvre de dispositifs efficaces de dissuasion de mouvements spéculatifs de prédation, déstabilisateurs des devises et des investissements productifs
  •  le soutien actif de politiques de stimulation, facilitation de projets économiques et sociaux  solidaires d’intégration populaire, génératrices de garantie de revenus décents,  suffisants, pour la constitution et le développement, dans la dignité, de la famille, cellule de base du corps social
  •  le réexamen de la pertinence et du bien-fondé de la dette extérieure de certains pays, par analyse et réflexion, en profondeur, cas par cas, des conditions de légitimité  de sa création
  • une révision des méthodes de négociation des accords commerciaux internationaux en vue d’une juste conception des transactions et de leurs retombées financières, marquée par une volonté réelle de changement des rapports de forces actuellement défavorables aux pays pauvres, parties à ce type de « contrats léonins », en fonction des besoins vitaux de leurs populations, pour l’instant paupérisées et exclues d’un partage équitable
  • le prélèvement d’un pourcentage, sur les volumes de transactions boursières, en vue d’une constitution de fonds complémentaires affectés à des plans de développement des  pays victimes des conséquences de l’application de « théories économiques dévastatrices, darwiniennes


D/- L’ENSEIGNEMENT DE JESUS SUR 
LA RAISON D’ETRE ET 
LA MISSION DE SES DISCIPLES 
FACE AUX BESOINS DES PERDUS


1- L'ESPRIT DE LA COMMUNAUTE MESSIANIQUE

Les chrétiens sont des « artisans du cœur et de l’esprit » appelés et préparés par le Seigneur à découvrir, au sein des situations les plus précaires, une plénitude nouvelle, celle que Jésus vit et leur partage dans le message des béatitudes (MATTHIEU 5:3-10), plus expressive d’un encouragement à l'espérance que d’un conseil de résignation; chaque promesse des  béatitudes concernant toujours un Règne de Dieu, déjà bien présent dans la venue de Jésus, mais toujours en attente d’accomplissement et de consommation ultimes, définitifs, dans le futur (ROMAINS 8:18)

La justice surabondante prônée par Jésus radicalise les prescriptions de la loi, par l’instauration de nouvelles « normes comportementales pneumatiques » de rapports  fraternels  renouvelés, au sein de la communauté messianique, de la famille de Dieu.

Jésus, en effet, convie ses disciples à imiter la perfection de leur Père Céleste, par une exhortation à promouvoir un accueil mutuel et une réconciliation inconditionnels, vivre la fidélité conjugale et respecter le foyer d’autrui, pratiquer la vérité dans les échanges fraternels, exercer l’amour des amis comme celui des ennemis, cherchant par tous moyens et voies spirituels, conformes aux principes du Royaume, l’obtention d’une croissance et d’un développement systémiques, holistes, individuels et collectifs -  esprit, âme et corps/ personnes et communautés.

En fait, l’essentiel de ce nouveau pattern de vie trouve son fondement en Jésus et sur la révélation qu’il communique du « mode d’agir du Père » dont la force d’accomplissement est seule capable d’en permettre la réalisation plénière (JEAN 5:17-20; 14:9-13; 15:1-5; PHILIPPIENS 2:13; EPHESIENS 4:11-16)

Le père est, tout à la fois, principe, motivation et finalité de toutes attitudes, conduites et comportements de justice, dont le niveau d’intimité filiale détermine la qualité.

La justice du Royaume, de nature foncièrement différente de celle de l’ancien régime légaliste, formaliste, inopérant, des scribes et des pharisiens, résulte d’un engagement dans l’esprit de la grâce, fidèle, intègre, loyal, sincère -  « holiste et fractal » - au service de Dieu, dans une communauté de vie indissoluble avec lui, génératrice de fruits multiples en faveur du frère, du prochain et…du monde entier.

Ce tempérament de base des disciples, fruit du don de la filiation eschatologique, caractérisé par une focalisation exclusive de la conscience et de l’être sur Dieu et le prochain, se manifeste par une ouverture illimitée aux exigences radicales du divin, pour la réalisation de son dessein éternel de conception, formation et édification d’êtres régénérés, sur le modèle matriciel de Christ, en vue de leur incorporation définitive à la famille éternelle du Père (1 CORINTHIENS 3:4-9; ROMAINS 8:16-23)


2- LE SERVICE MISSIONNAIRE

La communauté des disciples formée par Jésus est ontologiquement missionnaire, dans la mesure où la mission se définit comme implication et participation des disciples aux initiatives, actions et desseins du Maître.

Cette communauté se caractérise par l’importance  particulière attribuée aux  pauvres, démunis, spoliés, exclus et discriminés par un monde aux archaïques programmations darwiniennes, égocentriques et ethnocentriques.

La situation de crise actuelle, gravement porteuse d’une menace de déstabilisation et d’inhibition de l’unité synergique de la communauté chrétienne ainsi que d’une stagnation des objectifs de justice et de compassion assignés par son maître, exige un sérieux regain de résolution et de détermination dans sa volonté d’accomplissement du mandat divin, avec une assurance et une certitude renouvelées de l’indéfectible présence de son Dieu, en son sein et de l’imminence de l’avènement de son Royaume (MATTHIEU 6:23; 28:16-20)

En tout état de cause, par son assistance persévérante, bienveillante, sans faille et en dépit des pesanteurs historiques et sociologiques de la culture sublimée et institutionnalisée du péché, par ce monde, le Ressuscité glorifié ne cesse de tendre, de manière exponentielle, vers l’affectation de sa propre valeur divine au sens de l’existence des hommes, en agissant par ses disciples au milieu des nations, pour promouvoir l’extension de sa divine et resplendissante nouvelle création (ROMAINS 8:33-39)

Il est maintenant temps de prendre conscience de l’importance particulière des enjeux eschatologiques, de faire preuve d’esprit de décision, d’endosser et assumer totalement ses  responsabilités, de privilégier les voies du don, de l’amour des frères, du  prochain et de risquer les talents reçus dans un engagement catégorique et indéfectible (MATTHIEU 25:14-40)

Tout est possible car le mandat de mission universelle, réalisation de la promesse faite à Abraham (GENESE 12:3), rend, désormais la puissance de Dieu disponible à tous les croyants, par la foi, en tous lieux géographiques et temps historiques, jusqu’à la consommation finale du monde.


 
E- DES ENGAGEMENTS CONFORMES 
A L’EVANGILE DE L’INCARNATION
 
1- L’EVANGILE DE L’INCARNATION


La conception du Royaume que Jésus développe, dans les évangiles, inclut tout en la transcendant, la condition humaine, avec ses souffrances, ses besoins,  attentes et  aspirations.
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Considérer l’ensemble des dimensions de la vie terrestre, en référence et corrélation avec les principes fondamentaux du Royaume, constitue une grille de lecture et une potentialité de transformation de la réalité, en harmonie avec la vision du Maître d’un haut niveau de performance, permettant de traiter, de manière optimale, les vrais enjeux, risques et défis divins, situés à l’intersection de l’histoire du salut et de la première humanité mortifiée par le péché (MATTHIEU 6.33)
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L’amour de Jésus pour le pécheur n’ayant d’égal que son aversion pour le péché, agent de perdition,  explique et justifie son implacable dénonciation de toutes les formes de corruption et de perversion aliénatrices, dépravatrices de la nature humaine: hypocrisie des pharisiens, cupidité du riche insensé, avidité des vignerons homicides … (MATTHIEU  23:1-33)
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La mission des disciples doit être configurée sur le Christ qui envoie comme le Père l’a envoyé, communiquant un modèle en sa personne, en vue de l’accomplissement fructueux du mandat qu’il leur a confié jusqu’ à son retour (LUC 4:18-19)
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L’Eglise est ainsi formée par une communauté de personnes réellement nées de nouveau, spirituellement soustraites à l’influence du monde, puis réinvesties à son service, avec une nature  régénérée, incorruptible, préservée de tout risque d’assimilation ou de rechute sous les puissances du siècle, par  éventuel « syndrome de confusion de genre.»
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Cet  engagement et cette implication ne sont pas une « simple option sociale » mais une « impérative obligation de l’esprit », « catégorie en soi  irréductible » aux  thématiques idéologiques générées par la société historique.
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L’Eglise doit bannir toute approche des réalités de la souffrance humaine, due au péché, par une dogmatique biblique formaliste, dépersonnalisée, désincarnée et promouvoir une approche de ces mêmes réalités par une évangélisation.
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personnalisée, incarnée, chaleureuse, non altérée par une culture de cloisonnements et clivages institutionnels artificiels, contre-productifs - car « l’union, sur des bases doctrinales saines et des relations fraternelles authentiques, sera toujours la force déterminante au sein des combats.»
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En tout état de cause, les communautés chrétiennes ne sauraient indéfiniment demeurer impassibles et inertes, face aux aliénations, maux et souffrances générés par le « projet de mondialisation de la vie sans Dieu », en laissant la conception réductionniste, confusionniste de leur foi, essentiellement focalisée sur la seule espérance future (dimension verticale de la foi: la relation à Dieu) inhiber, neutraliser leurs responsabilités sociétales présentes (dimension horizontale de la foi: la relation au prochain), reléguant ainsi une majorité de croyants à l’assimilation passive de principes et attitudes relativistes, individualistes, matérialistes, issus de la culture de masse, par privation de critères de référence, d’appartenance et d’identité messianiques précisément définis, ayant trait aux impératifs éthiques et implications concrètes de la vie nouvelle – articulant les deux inséparables dimensions, de verticalité et d’horizontalité de la foi ( EPHESIENS 4:20-21; ROMAINS 12:1-2; MATTHIEU 5:13-16; 2 PIERRE 1:3-11)
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Face à ce processus tentaculaire de mondialisation, l’Eglise est invitée à sortir de son sommeil dogmatique, renouveler son engagement de fidélité à l’ordre missionnaire de Jésus-Christ consistant à aller dans le  monde entier pour annoncer, individuellement et communautairement, l’évangile intégral du salut par grâce, répondant à la totalité des besoins, attentes et aspirations des  hommes: spirituels, physiques, intellectuels, économiques, sociaux, politiques - les deux erreurs extrêmes, antithétiques, étant, en ce domaine: l’attention et l’action exclusivement portées sur l’évangélisation et les besoins spirituels de l’être et celles quasi-exclusivement focalisées sur les problèmes économiques et sociaux du monde (COLOSSIENS 3:12; 1 JEAN 3:16-20)


2- L’EXEMPLE DU JUBILE
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A ce titre, le « jubilé » de l’ancien testament fournit une pertinente matrice conceptuelle pour la compréhension de la problématique: l’Eglise et la mondialisation.

Ce mot, procédant de l’hébreu « Yobel », signifie « corne de chèvre », qu’on devait utiliser comme trompette pour proclamer, tous les 50 ans, l’ouverture d’une année particulière pour Israël : l’année du Jubilé au cours de laquelle devaient être exécutées les prescriptions du chapitre 25 du Lévitique enjoignant principalement le rachat  de la propriété et la libération des esclaves.
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La configuration sociale d’Israël, structurée autour de l’appartenance à une tribu, une famille, avec la propriété foncière et immobilière comme constituants de la prospérité, devait  être régulée de telle sorte que toute propriété qui avait été vendue, pour différentes raisons, devait être restituée au propriétaire initial, au moment du Jubilé; de même, ceux qui  avaient été contraints de se vendre, pour insolvabilité, devaient être libérés.
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Ces prescriptions revêtaient une fonction éthique, de régulation et d’équilibrage du système économique et social du peuple, en faisant obstacle à l’accumulation et à la concentration excessives, abusives, des richesses entre les mains d’une minorité au détriment des droits fondamentaux à la vie d’une majorité d’exclus, spoliés, assujettis, asservis, laissés-pour-compte, sans pouvoir ni avoir.

Ces mêmes prescriptions - dont on n’est d’ailleurs pas certain qu’elles aient bien été pratiquées en Israël - offraient l'avantage de rappeler au peuple l'irréductible réalité de « l’Autorité Souveraine Absolue de Dieu sur les biens et les personnes, sur son peuple»   (LEVITIQUE 25:23,42,55)

Dieu portait ainsi à la connaissance de son peuple que nul ne peut demeurer l'esclave de son prochain, car tous sont serviteurs de Dieu seul, que toute la terre est sa propriété et qu’il est alors légitime titulaire d’un droit d’intervention sur sa création, pour en dénoncer, corriger les distorsions induites par le péché des hommes et inciter ceux-ci au respect de l’ordre créationnel.


Ce précédent, du jubilé, par sa mise en évidence de la tendance irrésistible de tout individu ou groupe d’individus, détenteurs monopolistiques d’un droit ou d’un pouvoir sur leur  prochain, à en abuser ainsi que de l’indispensabilité d’un dispositif de sécurité garant de la dignité de chaque être humain - préalablement sur le  plan naturel .... dans l’attente de conversion ultérieure - permet à l’Eglise de mieux cerner et déterminer l’ampleur de ses responsabilités, dans la perspective de l’accomplissement de sa mission spirituelle face à la mondialisation.
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Ce modèle du jubilé, « idéal de justice globale », pourrait être utilement considéré comme source de réflexion sur les notions de partage, de solidarité entre nations, régions, communautés et individus, mais bien évidemment, en fonction des données spécifiques du monde actuel.